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🌍 R.A.S Poutine?
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Briefing sur l'Ukraine

Jean-Baptiste Sciandra
Jan 30, 2022
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Ce qu’il se passe actuellement dans les mĂ©dias au sujet de l’Ukraine est la raison principale pour laquelle j’ai voulu lancer Marcopolo. Vous ĂȘtes certainement en train de lire dans vos diffĂ©rents journaux, ou encore plus croustillantes, sur les rĂ©seaux sociaux, une multitude d’analyses stratĂ©giques concernant l’attaque potentielle de la Russie contre l’Ukraine :

  • “Ils attaqueront d'ici Ă  deux semaines”,

  • “Ils n’attaqueront pas avant le mois de mars, ils ont besoin de 100 000 soldats de plus”,

  • “Les camions de fantassins ont Ă©tĂ© vus roulant en direction de la frontiĂšre ukrainienne, l’attaque est imminente”,

  • “Poutine veut juste faire pression sur l’occident pour qu’il n’accepte pas l’Ukraine dans l’OTAN, c’est tout, il ne souhaite pas rĂ©ellement attaquer l’Ukraine”,

  • “L’attaque sera hybride et aura pour objectif de mettre un gouvernement prorusse Ă  la tĂȘte de l’Ukraine”.

Eh bien je ne vais pas vous parler de toutes ces hypothĂšses aujourd’hui car bien malin (ou bien flippant) celui qui arrive Ă  se mettre dans la tĂȘte du plus grand psychopathe des deux derniĂšres dĂ©cennies, Poutine. Personne ne sait ce qu’il fera et lui-mĂȘme ne doit pas encore le savoir.

En revanche, il me semble beaucoup plus intĂ©ressant de tenter de comprendre comment on en est arrivĂ© lĂ , quelle est l’histoire rĂ©cente de l’Ukraine et pourquoi la Russie ne veut pas la laisser s’éloigner.

đŸȘ†La Rus’ de Kiev

  • L’histoire commune de la Russie et de l’Ukraine remonte Ă  la Rus’ de Kiev ou Russie KiĂ©vienne : un Ă©tat qui a durĂ© entre le IXᔉ et XIIIᔉ siĂšcle et qui s’étendait de l’Ukraine jusqu’au Nord de la Russie, avec pour centre de gravitĂ© Kiev.

  • Une (trĂšs grande) partie des Russes considĂšre donc la Rus’ de Kiev comme le berceau de leur civilisation.

  • À ce titre, Vladimir Poutine avait publiĂ© un article cet Ă©tĂ© expliquant que la Russie et l’Ukraine Ă©taient une seule nation.

  • Mais, l’histoire en a dĂ©cidĂ© autrement puisque l'Ukraine prend son indĂ©pendance en 1991, suite Ă  la dislocation de l'URSS.

  • Depuis, la politique locale oscille entre pro rapprochement vers l'Europe et pro rapprochement vers la Russie. Les tendances se construisent en fonction de plusieurs facteurs, mais la gĂ©ographie y est pour beaucoup. L'Est de l'Ukraine est russophone et littĂ©ralement collĂ©e Ă  la Russie, l'Ouest regarde plus vers l'Europe.

đŸ”„ 2004, round 1

  • Depuis son indĂ©pendance, l'Ukraine Ă©tait dirigĂ©e par Leonid Koutchma, un ancien du parti communiste devenu premier ministre puis prĂ©sident. Une vraie caricature : Ă©tat corrompu, hommes politiques proches de la mafia.

  • Lors des Ă©lections de 2004, le pro europĂ©en Viktor Iouchtchenko est battu par l'autre Viktor, le pro russe Ianoukovitch. Il est aussi sĂ©vĂšrement empoisonnĂ© pendant la campagne.

  • Les Ă©lections Ă©taient visiblement truquĂ©es, ce qui dĂ©clenche la fameuse rĂ©volution orange qui rĂ©unit plus de 500 000 manifestants et qui dure plus de deux semaines.

  • Les Ă©lections sont annulĂ©es et le clan pro Europe gagne la prĂ©sidentielle. Mais, la coalition gouvernementale n'arrive pas Ă  s'entendre et tombe vite dans des guerres de tranchĂ©es.

  • Le parti de Ianoukovitch (le pro russe) reprend la main lors des Ă©lections lĂ©gislatives suivantes et devient prĂ©sident en 2010. Le grand rendez-vous est clairement manquĂ© pour l’aile pro-europĂ©enne.

đŸȘ– 2014, round 2

  • La rĂ©volution de 2014 est dĂ©clenchĂ©e par le refus du gouvernement de signer un traitĂ© de rapprochement entre l'UE et L'Ukraine. La jeunesse pro occidentale de l'ouest forme d'Ă©normes manifestations dans plusieurs villes.

  • Elles sont trĂšs durement rĂ©primĂ©es (80 morts sur une seule journĂ©e de fĂ©vrier) et se transforment en une vraie guerre de tranchĂ©e, forçant le prĂ©sident Ă  fuir le pays vers la Russie. Un excellent documentaire de Netflix retrace d'ailleurs ces semaines de guerre civile.

  • Pendant que l'ouest manifeste, la Russie en profite pour faire main basse sur la CrimĂ©e. La Russie possĂšde lĂ -bas une trĂšs grosse base navale et la population y est majoritairement russophone.

  • Des militaires sans drapeaux ni distinctions sur leurs uniformes ont pris possession de l'Ăźle "pour la protĂ©ger" contre des agresseurs non identifiĂ©s. Personne n'Ă©tait dupe de la nationalitĂ© des militaires, russes en l’occurrence.

  • La CrimĂ©e s'est par la suite dĂ©clarĂ©e autonome et a demandĂ© Ă  la Russie de l'annexer, ce qui a Ă©tĂ© fait avec plaisir par Vladimir Poutine. Son annexion par Moscou n’est pas reconnue par la communautĂ© internationale, mais a Ă©tĂ© trĂšs populaire en Russie, qui a toujours considĂ©rĂ© cette Ăźle comme russe.

  • ParallĂšlement, il s'est produit presque la mĂȘme chose dans la rĂ©gion du Donbass, sans que la Russie arrive Ă  aller jusqu'Ă  l'annexion pure et simple.

  • Le Donbass est tout Ă  l'est de l'Ukraine, Ă  la frontiĂšre avec la Russie. C’est un bassin industriel important. Moscou soutient que la population est peuplĂ©e de russophones devant ĂȘtre protĂ©gĂ©s du nationalisme ukrainien.

  • L'ONU et certains pays occidentaux ont rĂ©ussi Ă  geler plus rapidement le conflit en signant les accords de Minsk II. Cela n’a pas permis aux indĂ©pendantistes de prendre pleinement possession de l'ensemble du territoire et de demander leur annexion Ă  la Russie.

  • Mais, depuis, le cessez-le-feu est rĂ©guliĂšrement violĂ© de part et d’autre et une guerre d'usure s'est installĂ©e, avec des altercations plusieurs fois par an. Depuis le dĂ©but du conflit, en 2014, on dĂ©nombre environ 13 000 morts

💣 2022, round final ?

  • L’annĂ©e derniĂšre, la tension est de nouveau montĂ©e d’un cran. Le prĂ©sident ukrainien Zelensky a montrĂ© les crocs face Ă  la Russie Ă  plusieurs reprises : 3 chaĂźnes de tĂ©lĂ©visions prorusses ont Ă©tĂ© bannies du pays, il a adoptĂ© une loi pour limiter l’usage du Russe et il a fait arrĂȘter un oligarque russe alliĂ© Ă  Poutine (il n’a peur de rien Zelensky).

  • Poutine a le dĂ©sagrĂ©able sentiment depuis plusieurs annĂ©es que l’Ukraine glisse doucement vers l’Occident. Le prĂ©sident russe aimerait que l’OTAN lui donne des garanties et dise haut et fort qu’il n’acceptera jamais l’Ukraine dans le club, mais l’OTAN ne souhaite pas s’engager.

  • Donc, Poutine rassemble depuis plusieurs mois des dizaines de milliers de troupes Ă  la frontiĂšre ukrainienne. D’abord, Ă  l’est, et maintenant au nord. En fera-t-il usage, dans un objectif de nĂ©gociation ou d’annexion. Telle est la question.

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