🇷🇺 Peut-on résister à Poutine, la suite
Cette semaine, Vladimir Poutine a signé un amendement constitutionnel lui permettant de briguer deux mandats présidentiels supplémentaires, une extension approuvée par les électeurs lors d'un référendum l'année dernière. Il pourrait rester en fonction jusqu'en 2036. Il a actuellement 68 ans et règne sur le pays depuis 2000. Oui, oui, on parle potentiellement de 36 ans au pouvoir : hors monarques, on n’est pas loin du record du monde.
Qui est Poutine ?
Issu d'une famille d'ouvriers, Vladimir Poutine commence sa carrière au début des années 80 au sein des services secrets russes. En 1991, il entre en politique lorsque son ancien professeur d’université devient le premier maire démocratiquement élu de Saint-Pétersbourg et lui demande de devenir son conseiller international. En 1995 il entre au cabinet du président Boris Eltsine puis en 1998 il devient directeur du FSB, les services secrets russes. On peut dire qu'il n'a pas chômé.
Pris entre une crise financière importante et des scandales à répétition, la popularité de Boris Eltsine dégringole. Entre 1998 et 1999 il tente de reprendre la main et change 6 fois de premier ministre en 2 ans. Le 6ème étant Vladimir Poutine. Le bon vieux Boris démissionne de la présidence le 31 décembre 1999, laissant Poutine président par intérim.
Anticonstitutionnellement
Vladimir Poutine gagne alors ses premières élections présidentielles en mars 2000, dès le premier tour. Il gagne de nouveau les élections en 2004, pour son deuxième et dernier mandat, selon la constitution. Et c'est là que cela devient intéressant. On parle de deux mandats consécutifs, et non pas de deux mandats dans l’absolu. Malin, pour les prochaines élections de 2008, il devient donc le premier ministre de son ancien premier ministre, Dimitri Medvedev, qui devient président. (Vous suivez ?) Sauf qu'au passage, il réduit les pouvoirs du président et renforce ceux du premier ministre. De 2008 à 2012, la Russie se retrouve donc avec un faux président et un premier ministre qui joue les présidents. Pendant cette période, ils font également changer la constitution pour que les mandats présidentiels ne soient plus de 4 mais de 6 ans.
En 2012, Poutine se représente à la présidence, pour son troisième mandat. Il gagne, évidemment. Ne vous inquiétez pas pour son ancien premier ministre, il redevient premier ministre. Enfin en 2018, Poutine entame son 4ème mandat présidentiel, qui se terminera en 2024. Comment continuer à rester président sans refaire le même coup (ce serait un peu trop gros) qu'en 2008 ? Facile, il suffit de changer la constitution et de prétexter que ces changements remettent les compteurs à 0. Cette nouvelle constitution a donc été "proposée" l'année dernière par le parlement, qui l’a directement ratifiée. Poutine ne fait que la signer cette semaine, grand seigneur. Techniquement, à partir de 2024, il pourrait de nouveau faire deux mandats de 6 ans.
Le néotsar
Mais pourquoi s'attacher éternellement à rester président me direz-vous ? En première lecture on pourrait se dire qu'il souhaite exercer le pouvoir (quasi absolu) aussi longtemps que possible car il aime tout simplement ça et pense certainement qu'il est la meilleure solution pour le pays. En deuxième lecture, si on en croit de nombreux articles sur le sujet, l'ascension de Vladimir Poutine s'est faite grâce à la corruption et au soutien d'une clique d'oligarques qui lui doivent énormément (et réciproquement). Mais dans ce système tout le monde doit durer pour que personne ne "tombe". Si Poutine ne peut plus se présenter, il sera dans l'intérêt des oligarques de trouver leur prochain poulain et de tout miser sur lui pour ne rien perdre de leur pouvoir, statut ou argent.
En outre, Poutine a eu la gentillesse de donner une immunité totale à Boris Eltsine quand il a quitté la présidence. Il lui faudrait la même assurance pour quitter sereinement la présidence. Le fond du problème c'est qu'au fil des années, les méthodes de Poutine pour rester au pouvoir ont évolué dans le mauvais sens. Du trucage d'élections et l'achat de voix au démarrage, il en est aujourd'hui à enfermer les opposants et réprimer durement toute dissidence. Et cela ne devrait pas s'améliorer dans les années à venir.
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