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🇻🇪 Vénézuéla
Cette semaine, le président Nicolas Maduro est le grand vainqueur des dernières élections parlementaires. Il renforce davantage son contrôle autoritaire et total sur l'état vénézuélien. Les partis d'oppositions avaient boycotté la campagne et l'organisation des états d'Amérique a déclaré que l'élection ne remplissait pas les standards de démocratie.
Anciennement, le pays le plus riche d'Amérique Latine, le Vénézuéla est une économie basée quasi exclusivement sur le pétrole : il représente 90% des exports et sert de ressource principale de dollars pour importer quasiment tout. La baisse du prix du pétrole des années 80 a un effet dévastateur sur l’économie avec une augmentation massive de la pauvreté. Ces années marquent le début de troubles politiques avec plusieurs coups d'état ratés et l'impeachment d'un président accusé de corruption. C'est sur ces bases qu'Hugo Chavez construit la révolution Bolivarienne, un mouvement de masse visant à instaurer une démocratie populaire, l'indépendance économique du pays, la distribution équitable des revenus et la fin de la corruption. Il est élu président en 1998. De 2000 à 2014 le prix du pétrole fait à peu près x5. Le pays a beaucoup, beaucoup d'argent à dépenser en programme sociaux, en aide alimentaire et les Vénézuéliens voient leur niveau de vie clairement s’améliorer.
Hugo Chavez a eu la chance de mourir en 2013. Il a nommé Nicolas Maduro comme successeur, beaucoup moins chanceux. Le prix du baril chute et les entrées de devises étrangères également. Une chute aussi rapide que douloureuse pour l'économie (voir graph) : l'inflation grimpe, les biens de consommation de base deviennent de plus en plus rares. Les Vénézuéliens commencent à descendre massivement dans les rues en 2014 pour protester contre le gouvernement, l'inflation et la corruption. En 2016, l'opposition remporte les élections parlementaires mais Nicolas Maduro tente de réduire les pouvoirs de l'assemblée. Les démonstrations de rues continuent massivement et elles ont réuni jusqu'à 3 millions de personnes en 2017. Depuis 2015, plus de 2 millions de Vénézuéliens ont fui le pays. En 2016, 74% des habitants du pays avaient perdu en moyenne 8 kilos. Plus de 82% des foyers vivent dans la pauvreté (contre 48% en 1998). Le Think Tank International Crisis Group estime que sur les 1000 milliards de dollars reçus de la manne pétrolière, un quart aurait été volé par le régime. En 2018, Nicolas Maduro est réélu. L'Assemblée nationale, majoritairement opposée au régime, ne reconnaît pas son mandat et nomme Juan Guaido président par intérim. Cette semaine, avec cette nouvelle élection parlementaire gagnée par le régime, vraisemblablement de manière pas très libre, le dernier bastion d'opposition au régime tombe. Les Vénézuéliens sont clairement les grands perdants.
🇪🇬 Égypte
Cette semaine, le président Égyptien, Abdel Fattah el-Sisi était en visite officielle à Paris. Une visite qui a fait débat, comme souvent lorsque la France reçoit le représentant d’un régime autoritaire.
L'Égypte fait partie des pays ayant « remercié » leur dictateur (Hosni Mubarak, en place depuis 1981) pendant le printemps arabe de 2011. Lors d'élections libres organisées fin 2011, Mohamed Morsi, candidat des Frères Musulmans, est élu président. Il est ensuite, lui aussi, remercié en juillet 2013 à la suite d’un coup d'état militaire. Des milliers de Frères Musulmans et leurs supporters sont incarcérés ou condamnés à mort. En 2014 le commandant en chef des forces armées Abdel Fattah el-Sisi se présente aux élections présidentielles, qu'il gagne haut la main. Il a été réélu en 2018 sans opposition réelle. Des changements constitutionnels ont été votés par le Parlement en 2019 pour augmenter les pouvoirs du président, de l'armée, passer le mandat présidentiel de 4 à 6 ans et autoriser le président à se présenter pour deux nouveaux mandats supplémentaires.
Depuis son arrivée au pouvoir el-Sisi n'a cessé de renforcer le caractère autocratique de son régime. Il a interdit les manifestations et muselé la société civile. Les élections qu'il a remportées en 2014 et 2018 étaient vraisemblablement truquées. Il est déjà revenu sur sa promesse de démissionner après son second mandat, puisque les dernières modifications apportées à la constitution lui permettent de rester jusqu'en 2030. Ces partisans contrôlent le Parlement par le biais de quelques partis satellites faussement dans l'opposition. Un de ces partis aurait même été créé par les services secrets. Plusieurs candidats ont indiqué que les places sur les listes électorales du parti présidentiel étaient à vendre au plus offrant. La branche business de l'armée, déjà bien implantée, n'a fait que croître sous Sisi prenant de plus en plus de parts de marché au secteur privé. L'armée est présente dans le BTP, les hôtels, les hôpitaux et fabrique même des pâtes. Elle ne paye ni TVA ni tarif d'importation. Bref, à l'approche des 10 ans du printemps arabe, la démocratie en Égypte n’a pas vraiment gagné au change.
Bon week-end à tous,
JB