Depuis plusieurs mois, un cabinet d'étude américain spécialisé dans l'aide au développement (AidData) s'est penché sur la Belt and Road Initiative chinoise ou les nouvelles routes de la soie en français.
Pendant les deux dernières décennies, la Chine a fourni des montants records pour financer des projets d'infrastructures et s'est imposée comme le banquier de premier recours pour de nombreux pays en voie de développement.
Après avoir passé en revue plusieurs milliers de projets financés par cette initiative, AidData est maintenant sûr d'une chose : la Chine a récemment fait preuve de beaucoup d'imagination pour que les schémas financiers soient le plus opaque possible, rendant l'exposition d'un état à la dette chinoise totalement incalculable.
🧵 Les nouvelles routes de la soie
La Belt and Road Initiative est un programme chinois de financements d'infrastructures (routes, chemins ferroviaires, ports, aéroports.) dans plus de 70 pays en voie de développement.
Le projet a été lancé par le gouvernement chinois en 2013 et est central dans la stratégie de diplomatie économique du pays.
L'objectif initial de l'opération est de favoriser les échanges commerciaux avec la Chine en développant les infrastructures nécessaires et surtout de sécuriser et diversifier les routes d'approvisionnement du pays.
C'est à ce jour le plus grand projet d'aide au développement de l'histoire. Plusieurs centaines de milliards de dollars auraient été déployés en 20 ans.
L'initiative s'est aussi bien développée en Afrique qu’en Grèce (le port du Pirée), en Russie et évidemment en Asie du sud-est où les projets pullulent, dont l'emblématique ligne de train entre le Laos et la Chine.
💰 La diplomatie du piège de la dette
Il est indéniable que l'initiative chinoise a contribué au développement d'infrastructures dans de nombreux pays. Plus de 130 pays soutiennent ce plan de financement chinois.
Ce que l'on reproche surtout à ces prêts ce sont les garanties associées : Elles protègent la Chine en cas de défaut de paiement du pays recevant l'aide.
Dans de nombreux cas les garanties sont des terres stratégiques, des infrastructures qui le sont tout autant ou des ressources naturelles.
C'est ainsi que le nom "diplomatie du piège de la dette" a été inventé : piéger un pays dans une dette insoutenable et récupérer un actif stratégique en échange.
En 2017, la Chine a, entre autres, pris le contrôle d'un port au Sri Lanka.
🆕 La dette dans la dette
L'étude d'AidData vient présenter l'affaire sous un angle totalement nouveau : il y aurait environ 400 milliards de dettes chinoises supplémentaires dans les différents pays en voie de développement.
Cette dette était jusqu'à présent invisible, car la Belt and Road Initiative ne prêtait pas uniquement aux pays, mais également à des entreprises d'état ou encore à des sociétés créées spécifiquement pour le projet à financer.
Les États sont solidaires de ces entreprises endettées, mais la dette elle-même n'apparaît pas au niveau national.
L'exemple de la Zambie est sidérant : le nouveau président Hakainde Hichilema, fraîchement élu cet été, a refait ses calculs. Il vient d'annoncer que la dette de son pays envers la Chine n'était pas de 3 milliards, mais en réalité de 6 milliards, soit la moitié de la dette de la Zambie.
Cette découverte pose problème à l'heure où plusieurs pays cherchent à renégocier leurs dettes auprès des institutions internationales, on se rend compte que personne n'a vraiment de vision globale du niveau d'endettement.
L'étude montre que pour plus de 44 pays, la dette envers la Chine uniquement représente déjà plus de 10% de leur PNB.
Tout cela ne se passe finalement pas si loin de chez nous. Le dernier exemple en date, c’est le Monténégro. Le pays a fait un emprunt d'un milliard de dollars auprès de la Chine pour construire une autoroute. Il n'arrive pas à faire face à la première échéance de remboursement et sera peut-être contraint de donner des terres à la Chine s'il fait défaut.
🌍 Le monde cette semaine
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🇷🇺 L'acharnement judiciaire continue contre Alexeï Navalny. La Russie a lancé une nouvelle procédure contre lui alors que celui-ci est déjà en prison. L'enquête mène cette fois sur la création d'un "groupe extrémiste". 👉 Traitement de choc au Novichok
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